Une découverte passionnante !


Une bonne nouvelle au gré de la semaine / jeudi, avril 2nd, 2020

le 2 avril, par Diana DE CROP
Photos: Guêpe maçonne confectionnant un nid (Youtube-J.Gorgues) Sociétés de chasseurs, Ed. Gründ (1989)

Quand des guêpes maçonnes millénaires œuvrent à la sauvegarde de la culture aborigène

Tout récemment en Australie, où les sites rupestres se comptent par milliers, un archéologue et des chercheurs ont mis au point une technique extraordinaire pour mieux comprendre le mystère des peintures aborigènes millénaires : la datation guêpe maçonne ! Parce qu’elles ne peuvent pas faire l’objet d’une datation au carbone 14 (méthode que les archéologues du monde entier utilisent) en raison de la nature de leurs teintures), les dater scientifiquement restait un problème.

C’est en étudiant des restes de nids de guêpes maçonnes fossilisées sur les parois des grottes qu’ils ont pu établir que ces peintures avaient, selon les différents sites étudiés,  entre 4.500 et 13 000 ans.

Une découverte déterminante pour les Aborigènes d’aujourd’hui.

Au delà d’être une innovation majeure pour étudier le passé, la « datation guêpe maçonne » est une découverte cruciale pour le combat actuel des  Aborigènes! En permettant, preuve à l’appui, de remonter dans l’histoire multimillénaire des peuples premiers d’Australie, ces peintures ont une portée politique déterminante pour les populations aborigènes qui revendiquent aujourd’hui des droits et des territoires. Face à la menace de destruction de leur culture et de leur peuple, l’art devient ici une redoutable arme identitaire.

L’art comme arme identitaire…

Depuis que les colons anglais débarqués au 18ème siècle sur leur île-continent ont désigné leur territoire Terra nullius – « terre de personne », la suite de l’histoire est connue : décimés par les maladies, massacrés, déplacés de leurs territoires ancestraux et spoliés,  ils ont vu leurs territoires réduits à peau de chagrin et leur culture « blanchie » par la volonté d’acculturation de la population blanche.

Dans les années soixante, quand les Aborigènes ont commencé à s’organiser pour revendiquer des droits et leurs territoires, l’art est devenu une arme politique, au point de s’inviter dans les tribunaux  comme des  « preuves », faisant, entre-autres, valoir leurs droits fonciers. De longues batailles juridiques s’en sont suivies où l’art et les oeuvres d’art aborigènes ont joué un rôle déterminant dans la reconnaissance de leurs droits politiques. « En 2002, des peintures aborigènes donnant à voir le lien entre le territoire et la culture ont permis la rétrocession d’un territoire de 54 000 m2 »,  expliquait  en 2017 Roberta Colombo Dougoud, commissaire de « L’effet boomerang » à Genève.

… continué par les artistes d’aujourd’hui

Passeurs du savoir de leurs ancêtres et puissamment enracinés dans leur culture ancestrale, les artistes aborigènes contemporains participent à ces combats. Une nouvelle vague menée par des plasticiens qui ont une double culture et vivent en ville continue à affirmer cette identité et à repenser l’histoire. Le monde les découvre… Des expositions phares comme celles de la Galerie Gagosian à New-York en 2019 et du Musée d’Aquitaine à Bordeaux en 2013 ont exposé les plus célèbres artistes aborigènes contemporains et fait résonner la mémoire millénaire de leur art.

N’oublions pas de rendre à César…  Au-delà de ce vaste mouvement,  n’oublions pas de saluer … ces minuscules guêpes de boue millénaires, qui sans le vouloir, leur ont auront apporté une aide incommensurable.

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